dimanche 19 octobre 2014

Manyach


Visages "sans Ages".....

Dans les Âges successifs du sol
Dans les racines de son Double
Dans l’incendie des mondes
propagé sur la terre...
Sur l’abîme d’un visage
comme une lance plantée dans l’ombre
Sur les sables enfermant un corps
respirant dans les fonds...
... Puis ces comètes éteintes
dans le château solaire
La neige carbonique recouvrant
des villes flottantes

Les Damnés de Visconti

leurs mains fouillant les décombres.

2
L’Heure teintait au nadir des vies antérieures...
Elle apparut dans l’ovale fenêtre
à travers les rayons d’or
Libérant le noir désir de l’orage en toi.
Comment peux-tu murmurer ainsi son nom :
Celle qui se dénude dans tes membres ?
... Oh n’entrez pas dans le royaume
avant que la terre nous recouvre !
Et que les climats se dissipent à l’avant du navire
comme la voile des abysses...
3
Dans la géométrie de la pensée
Sous la pierre tombale
Dans la forêt des limbes
Dans la lumière
JUSQU’À L’ENSOLEILLADE...

J’habite la déchirure des régions disparues
les drailles et les frontières
le fleuve tumultueux
les cendres encore tièdes...
La Vie reviendra t’elle ?
Je gis, au milieu du Temps, dans son devenir...

Didier Manyach, L'Ensoleillade.
........................................................................................................
Extrait de Piraterie, Migration et Merveille de Grâce....A commander encore et encore..La suite, bientôt....



  1. Didier Manyach - Editions K'A

    www.editionska.com › LivresParaules
    11 nov. 2013 - ISBN 979-1-914355-05-5 prix de vente 15€ Migration Piraterie et merveille de grâce regroupe les receuils suivants : REMONTÉS DES FONDS ...



mercredi 15 octobre 2014

Beckett



Un monde sans visage...

Que ferais-je sans ce monde sans visage sans questions
où être ne dure qu’un instant où chaque instant
verse dans le vide dans l’oubli d’avoir été
sans cette onde où à la fin
corps et ombre ensemble s’engloutissent
que ferais-je sans ce silence gouffre des murmures
haletant furieux vers le secours vers l’amour
sans ce ciel qui s’élève
sur la poussière de ses lests




Les Hautes Herbes de Mathieu Gérault

que ferais-je je ferais comme hier comme aujourd’hui
regardant par mon hublot si je ne suis pas seul
à errer et à virer loin de toute vie
dans un espace pantin
sans voix parmi les voix
enfermées avec moi


Samuel Beckett, extrait de Dieppe
______________________________________
A redécouvrir, les correspondances....




  1. "Cette vie est terrible": Beckett par lui-même - 21 mai 2014 ...

    bibliobs.nouvelobs.com › BibliobsDocuments
    21 mai 2014 - Actualité > Bibliobs > Documents > "Cette vie est terrible": Beckett




dimanche 21 septembre 2014

Michaux




Le masque du vide ou l'envers du décor 


Le Narcisse noir de Michael Powell



Souvent réapparaissent, dans le retrait de moi-même, les masques du vide.
Les masques que prend le vide ne sont pas pleins.
Ce ne lui est pas nécessaire.

Quelques traits infimes veillent à le masquer; y suffisent.
Assurément, il est là, on

l'oublierait presque......Ces masques vont

ordinairement par deux et s'impriment, frêles mais durs, dans le disque achevé de l'univers.

On pourrait croire à des gestes, à l'algèbre de gestes arrêtés dans un cataclysme pompéien.
Mais aucune trace de cataclysme.
Au contraire une étrange immobilité, et partout dans le
Spectre même de la puissance, la succion effroyable du
Vide.

Il y a aussi les déserts du matin, jonchés d'animaux morts...


 Henri Michaux, Épreuves, Exorcismes
-----------------------------------------------------------------------------
Approche incontournable:

  1. Les chemins de traverse d'Henri Michaux

    www.maulpoix.net/traverse.html
    Fragments de Jean-Michel Maulpoix sur Henri Michaux. ... Sous le masque de l'adulte important, il discerne le visage du nouveau-né, ses yeux glauques qui n'y 

vendredi 29 août 2014

Daumal


  1. Le visage de l'autre est un frisson....




    Paris Texas de Wenders


     " La peau du fantôme "

    Je traîne mon espoir avec un sac de clous,
    je traîne mon espoir étranglé à tes pieds,
    toi qui n'es pas encore,
    et moi qui ne suis plus.

    Je traîne un sac de clous sur la grève de feu
    en chantant tous les noms que je te donnerai
    et ceux que je n'ai plus....
    Dans la barque, elle pourrit, la loque
    où ma vie palpitait jadis;
    toutes les planches furent clouées,
    il est pourri sur sa paillasse
    avec ses yeux qui ne pouvaient te voir,
    ses oreilles sourdes à ta voix,
    sa peau trop lourde pour te sentir
    quand tu le frôlais,
    quand tu passais en vent de maladie.

    Et maintenant j'ai dépouillé la pourriture,
    et tout blanc je viens en toi,
    ma peau nouvelle de fantôme
    frissonne déjà dans ton air.

    Daumal
     (Merci à Patricia Suescum pour la découverte de ce poème)
    ---------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
    A (re)découvrir)

    La Bleue


    René Daumal

    Tu t'es toujours trompé



lundi 25 août 2014

Ancet



La bouche noire des visages....



c’est là devant on regarde
la pièce vide le jour
arrêté sur la fenêtre
dans les yeux on voit venir
ce qu’on a jamais pu croire
on bat des cils on va dire
mais comment dire on se tait



Johnny Got His Gun de Dalton Trumbo



on attend on n’entend rien
on voit passer la lumière
plus loin là où les visages
brillent des morceaux de neige
restent suspendus aux branches
goutte à goutte ils étincellent
et s’évaporent on écoute


Jacques Ancet, La lumière et les cendres
_________________________________________________________________________________

La lumière et les cendres | 15 mars 2014

VIENT DE PARAÎTRE

JACQUES ANCET
La lumière et les cendres
milonga pour Juan Gelman
édition bilingue : préface et traduction de Rodolfo Alonso
Editions CARACTÈRES



dimanche 24 août 2014

woolf



Sous le visage, le silence....




Fiona d'Amos Kollek


    C’est curieux de voir hésiter les gens à la porte de l’ascenseur. Passeront-ils ici, ou là ? Leur individualité s’affirme par le choix : ils sortent. Une nécessité les pousse, l’obligation misérable d’aller à un rendez-vous, d’acheter un chapeau, sépare ces beaux êtres humains si parfaitement unis tout à l’heure. Quant à moi, je n’ai pas de but, je n’ai pas d’ambition. Je me laisse porter par le courant. La surface de mon esprit glisse comme un pâle ruisseau reflétant les objets qui passent. Je suis incapable de me rappeler mon passé, la forme de mon nez ou la couleur de mes yeux, ni quelle est l’opinion que j’ai généra-lement de moi-même. Ce n’est qu’aux moments critiques, en traversant une rue, sur le rebord d’un trottoir, que mon instinct de conservation se saisit de moi, et m’arrête devant un autobus. Décidément, nous tenons tout à vivre. Puis, de nouveau, l’indifférence m’envahit. Le vacarme des voitures, le passage de figures pareilles qui se dirigent tantôt ici, tantôt là, me transportent dans un rêve d’intoxiqué, et les traits s’effacent des visages. Les gens pourraient tout aussi bien passer à travers moi. Et qu’est-ce moment du temps, ce jour entre les jours où je me trouve pris ? Le grondement de la circulation pourrait être tout aussi bien le vaste murmure des forêts ou le rugissement des fauves. La roue du temps a reculé d’un tour : nos progrès si récents sont anéantis. En vérité, nos corps sont nus. Nous ne sommes que légèrement recouverts de tissus soigneusement boutonnés, et sous ces trottoirs se cachent des coquillages, des ossements, et du silence.

 Les Vagues de Virginia Woolf
____________________________________________________

A lire: très bel article d'Angèle Paoli sur Woolf.




  1. Virginia Woolf | Sombrer dans le bleu - Terres de femmes

    terresdefemmes.blogs.com/.../virginia-woolfsombrer-dans-le-bleu.html
    29 juin 2010 - Virginia Woolf, Le temps passe [Times passes, 1926], Le Bruit du temps, 2010. Édition bilingue. Traduction de l'anglais par Charles Mauron.

jeudi 5 juin 2014

Manyach

Un visage se révèle....




 A hen in the wind d'Ozu

Un visage se révèle
Dans la boite noire
D’un homme revenu de quel naufrage ?
L’encombrement de la perte
Ou de l’absence
N’est pas le vide :
Une coquille creuse d’illusions
Et de simulacres
Un œuf blanc
Translucide
Comme un cerveau d’enfant
Avant de naître
Illuminé par le sang

Dans la poche du ciel.
C’est dans ce cercle
Que le hochet du néant
Joue avec la semence de l’infini
Et que la conscience vibre
Dans l’univers
Emportant la forme du temps
Au centre des galaxies:
L’instant surgit
Sur un lit d’étoiles

Et de pierres plates..
Limpide origine perdue
Rendue au langage qui s’y incruste
Pour ouvrir la voie
Du vivant.
Mais au pays natal
Résonne déjà la voix
Du pays mortel
Comme un écho que la vie digère
Pour avaler la mort
Et ensemencer la terre !
Dans ce carré devenu mental et obscur
Se trouve pourtant une lampe
Embarquée sur les dents de la roue
Une lampe de saveur
Une lampe de douleur
Une lampe sur la route:
C’est une grimace sur un torchon
Une chair dans un corps
Et un signe dans la bouche.
Le présent se dilue
les ombres arrachent la paroi
De l’eau pourrissante:

L’axe qui nous délivre
Est aussi l’os qui s’incline .
Dans cette rotation
Quand la proue choisit la navigation ou le fracas
Nous naissons avec le soleil
Mais nous venons des étoiles
Des algues
Et du souffle
Qui ne tient qu’à un fil:
Celui que la lampe tisse
Dans la grammaire de nos veines
Avec le sang du verbe
Le vent
Qui fait trembler la flamme
Et le feu
Ou le silence
Des astres.
Alors toutes les pensées chavirent dans l’impensable
Puis dans l’écume ruisselle
Le matin du monde …


Didier Manyach, extrait d'Onde Invisible
_______________________________________________________________________________
A lire aussi....







  1. didier manyach lettres à josé galdo, ghemma quiroga & jean ...

    blockhaus.editions.free.fr/ManyGald.htm
    CARTE POSTALE DE DIDIER MANYACH À JOSÉ GALDO & GHEMMA QUIROGA (AOÛT 1990). CARTE POSTALE DE DIDIER MANYACH À JOSÉ GALDO ...

mercredi 4 juin 2014

Reverdy


Le visage a un nom....


En passant une seule fois devant ce trou j’ai penché
mon front
Qui est là
Quel chemin est venu finir à cet endroit
Quelle vie arrêtée
Que je ne connais pas

Au coin les arbres tremblent
Le vent timide passe
L’eau se ride sans bruit
Et quelqu’un vient le long du mur
On le poursuit

J’ai couru comme un fou et je me suis perdu
Les rues désertes tournent
Les maisons sont fermées
Je ne peux plus sortir
Et personne pourtant ne m’avait enfermé

J’ai passé des ponts et des couloirs
Sur les quais la poussière m’aveugla
Plus loin le silence trop grand me fit peur

Et bientôt je cherchais à qui je pourrais demander
mon chemin

On riait
Mais personne ne voulait comprendre mon malheur




Dead man de Jamursh



Peu à peu je m’habituais ainsi à marcher seul
 Sans savoir où j’allais
Ne voulant pas savoir
Et quand je me trompais
Un chemin plus nouveau devant moi s’éclairait

Puis le trou s’est rouvert
Toujours le même
Toujours aussi transparent
Et toujours aussi clair

Autrefois j’avais regardé ce miroir vide et n’y avais
rien vu
Du visage oublié à présent reconnu


Pierre Reverdy  La Lucarne ovale
----------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

A suivre........


  1. La poésie cubiste n'existe pas - Jean-Michel Maulpoix & Cie

    www.maulpoix.net/blogjmm/wordpress/254/
    10 janv. 2013 - Pierre Reverdy fait figure d'éminence grise de la poésie de la première moitié du XXe siècle. Sa réputation excède son audience. On le situe ...